Waiting for the one
The Day That Never Comes
When you stand up and feel the warmth
But the sunshine never comes, no

C'était impossible à imaginer, pourtant... Samuel Wolstenholme devait avoir raison. Soit Shina Suzu ne voulait en fait pas de moi soit... soit... elle était morte. Cette pensée était tellement douloureuse à pouvoir avaler. Je ne savais si ce qu'il avait dit était vrai. Pouvait-on vraiment lui ôter la vie si facilement? Je m'étais promis de ne jamais douter d'elle. C'est vrai. Je n'ai jamais éprouvé un quelconque soupçon envers elle mais envers le jour où nous reverrons... Ce jour ne viendra sans doute jamais. Ce soleil ne viendrait plus jamais éclairer mes jours et je vivrai et mourrai seul, haït par la quasi totalité du monde - seuls quelques humains et certains lycans s'étaient attachés à moi. J'ai tué mon être le plus chère, fait tué ma deuxième raison de vie... Je ne pouvais pas encore imaginer à nouveau la mort d'une personne auquel je tenais autant, c'était tout à fait impossible! Je priais presque pour que ce ne soit qu'un mensonge de la part de ce crétin infâme! Cependant... Ma raison me forçait à la laisser prendre le dessus : il faudrait s'y faire, Shina Suzu était morte.

Les jours suivant ma confrontation avec Sam - et James Littleton, le chef du clan des lycanthropes, entre autres -, je n'avais fait que songer et errer où mes jambes me guidaient - c'est-à-dire, n'importe où. Parfois, je percevais une odeur de vampire, mais pas la sienne. Pourquoi le sort s'acharnait-il autant sur moi? N'avais-je déjà pas assez souffert? Peut-être pas, en fin de compte... Combien de fois on nous l'aura répété et redit que la vie était une injustice cruelle permanente? Alors que l'on croit que tout s'arrange, en fait, cela devient pire.
J'observai le ciel, couvert de nuages gris fonçant plus le temps passait. Une terrible pluie ou un orage approchait. Or, je n'avais pas envie de rentrer. On dit qu'on est bien chez soi, mais moi j'étais mieux dehors.
Après de multiples réflexions je retournai de nouveau à Samuel. A vrai dire, depuis que je connaissais Shina, mes tourments naissaient chez lui. Avant, c'était les lycans, puis les vampires. J'ai apprit à vivre avec ma race et à détester les vampires plus que tout. Ensuite, cette jeune fille si fragile m'est apparue. Je ne pouvais me résigner à la mépriser comme tout les autres, c'était injuste, tout comme la vie, en fait. Je devais donc la faire un peu "rêver", dirons nous, la sortir pour un temps de l'enfer vicieux de l'existence. Or, ce stupide lycan, semblant être né juste pour pourrir la vie aux autres, en avait décidé autrement. Mais je me vengerai, c'est chose promise. Peut-être que j'ai échoué cette fois mais c'est parce que ce James s'en est mêlé! Lui aussi a fait serment d'une chose : si je retournai trop près du camp, il me tuerait de ses propres mains. Il a également promit cela à Shina. Je ne sais pas quoi penser de lui... D'un côté je le hais, mais d'un côté... je l'admire un peu. Pour rien au monde, il ne changerait quelque chose à ses règles. C'est un homme d'honneur, je comprends pourquoi il peut me haïr autant... Mais Shina. C'est un vampire, oui, mais est-ce qu'une ou l'autre exception, tuerait un homme? Quasiment tout le clan était au courant que les suceurs de sang ont tué son très cher frère - Lars Littleton, un mec que j'appréciai plus que son frère auquel il tenait tant. C'est vrai, des deux, Lars était le plus sympathique mais aussi le moins à cheval sur les conventions. Je ne pourrai dire si il aurait agit autrement - sans doute que oui - et si il nous aurait chassé tout les deux, c'était un problème auquel je ne pouvais donner aucune réponse.
Je ne m'égarai pas plus longtemps sur ces hommes. Pourtant, je n'avais pas d'autres sujets auxquels réfléchir. Alors que je me demandai à quoi pouvait songer un homme meurtri et en pleine interrogation, je me rendis compte que je me trouvai dans le Victoria Park. Malgré le mauvais temps s'annonçant, quelques enfants y jouaient pendant que leurs parents les surveillaient avec bienveillance. Mes parents aussi me manquaient, mais eux aussi sont morts et eux, voulaient ma mort quand tout le monde découvrit ce que j'étais devenu. Certaines personnes s'en foutent d'être haïes pendant que d'autres ne peuvent le supporter. Je crois me trouver entre les deux. D'une part je suis malheureux de ne pas avoir de compagnie car la seule que j'avais n'est plus de ce monde mais de l'autre, j'ai toujours été un peu solitaire et ce n'est pas plus mal que ça de rester un peu tranquille. Comme bien des choses il y a le pour et il y a le contre. Et comme bien d'autres, je ne pouvais pas choisir, les autres décidant beaucoup trop pour moi. Ne contrôler qu'une infiniment petite partie de sa vie était très frustrant, pourtant cela arrivai à beaucoup de gens. Toute une vie passé à subir les autres est choses difficile, croyez moi.

Sans vraiment y réfléchir, je m'assis sur un banc de cet agréable parc. Quelques personnes attardaient leur regard sur moi avant de le détourner, trouvant autre chose à observer intensivement. Certaines personnes, à force de se sentir observer, deviennent paranoïaque. Or, pour ma part, sentir une multitude de pairs d'yeux se poser sur un solitaire détesté de toute part ne me dérangeait pas plus que ça. Si j'étais comme toutes ses personnes, je suis sur que je réagirai autrement. Il n'y avait que des humais dans le parc. Au loin, dans des rues voisines sans doute, quelques odeurs de ma race et de celle des suceurs de sang, se laissaient sentir mais je n'en m'en souciai pas plus.
Après quelques minutes où j'avais scruté les horizons sans ménagement, je me dis que j'aurai du embarqué un livre. C'est vrai, j'avais toujours adoré lire. Il n'y avait pas longtemps, j'avais commencé un livre du nom de "Waylander". C'était l'histoire d'un assassin détesté lui aussi de tous et d'un royaume en guerre. A vrai dire, si l'on ôtait les détails de "Chiens du Chaos", Mercenaires, armures magiques et histoires de pillages et destruction - enfin, d'une certaine manière on pouvait en laisser quelques uns -, cette histoire ressemblait beaucoup à notre monde. Certaines profitaient d'autres pendant que beaucoup subissaient et souffraient alors que quelques uns triomphaient. Triste mais vrai.

J'avais la curieuse envie de partir courir, peut-être était-ce à cause de ces quelques personnes assez courageuses pour encore courir par ce froid. Mais quelque chose me disait de rester... Quoi? Une sorte d'intuition trottinant dans mon esprit, attendant surement quelque chose. Mais quoi donc? Qu'il pleuve? Qu'un lycan me saute dessus? Qu'un vampire viennent me narguer? Je ne savais pas, mais je m'écoutais. Je n'aurai su vous dire pourquoi... A vrai dire, ça m'étonnait beaucoup tout ça, néanmoins, autant écouter une ou l'autre intuition quand pour une fois elle nous semble bonne.

[Fragile - Sting ]

Depuis combien de temps étais-je seul? Combien de temps dans tout ma vie avais-je été seul? Longtemps, très longtemps, même. J'ai tué ma femme, et je n'ai pas su protégé ma fille... Qui, qui voudrait d'un type comme moi? Personne, c'est un fait. Samuel, même si c'était mon pire ennemi, devait avoir raison. Soit même Shina ne voulait pas de moi, soit elle était défunte. Dans les deux cas, cela revenait à la même chose : j'étais seul. Seul, depuis longtemps, très longtemps, sans doute même trop longtemps. C'était sans doute comme cela que j'allais finir, en tant que vieux loup solitaire banni de sa propre meute.

Pour ne pas changer, j'étais seul sur un banc alors que le soir s'installait sans que je n'y prenne garde. Je ne faisais même plus attention aux odeurs qui pouvaient me parvenir, aux sons, ou à une quelque chose extérieure à mon être. J'étais parti loin dans mes pensées, terriblement loin. Je repensais au doux visage de Clémentine, celle à qui j'ai ôté la vie alors que je l'aimais tellement. C'était une femme unique, douce comme de la soie, à la tendresse infinie, intelligente de plus. Et Lilly... Ah, une enfant extraordinaire tout simplement. Elle avait tout de sa mère, même les cheveux roux. Elle possédait une pointe de mon caractère, aussi, sans pour autant être aussi solitaire, bien au contraire. Et j'ai réussit à tout gâcher...
Je pris mon cou dans mes mains, observant intensivement le sol. Juste mes pieds... Rien de très intéressant, c'est un fait. Mais plus le temps passait, plus je me rendais compte que de moins en moins de choses m'intéressaient. A croire que tout, vraiment tout m'abandonnait.

Un homme passa, laissant un moment son regard sur la silhouette posée sur ce banc du Victoria Park. A en croire son regard, il éprouvait de la compassion à mon égard. Pourquoi? Au fil des jours, j'avais remarqué des cernes se dessiner autour de mes yeux, mes joues se creuser, bref j'allais de plus en plus mal. Mon air n'était donc pas très glorieux... Et la larme qui vint rouler sur ma joue, ne rajoutait rien de bien égaillant à tout cela. Et ma vie? J'en faisais quoi maintenant? Pas question de se donner à fond dans le clan : James voulait me tuer! Trouver quelqu'un qui voudrait de moi? Tout ce que les gens éprouvent à mon égard est soit de la pitié soit de la haine. Alors? Je faisais quoi moi?

- Fait pas beau hein

Ce que je faisais? J'étais épris d'une vague de sentiment impossible à décrire ou encore à contenir, tellement elle était soudaine et grande. Ce que je faisais? Je n'osais pas me retourner, sentant perles après perles s'écouler sur mes joues. Ce que je faisais? Maintenant? Je vais vous le dire ce que je faisais là, j'étais devenu une des personnes les plus heureuses de la Terre, vous pouvez me croire.

Je n'osais pas me retourner, pour une raison qui m'échappait. Si, c'était la voix de Shina. Alors? Qu'est-ce que j'attendais?! Me redressant, ne détournant toujours pas le regard du sol, je lui répondis, la voix tremblante d'émotion

- Tu te trompes, c'est un des jours les plus beaux, de toute ma vie...

Ensuite, j'estimai que j'avais assez attendu et me retournai d'un coup avant de prendre appuis sur le dossier du banc et de tout simplement le sauter pour enfin se retrouver en face d'elle, en face de Shina. Je ne réfléchis pas plus longtemps à la question, je l'a pris dans mes bras. Cela faisait trop longtemps que je ne l'avais plus vue, touchée, sen... sentie! Elle sentait comme un vampire. Bon, peut-être que pour un lycan s'était dérangeant, je m'en foutais éperdument : elle était là devant moi, là, juste là.
Je ne pris pas initiative de parler, du moins pas de suite, non, je préférai laisser cet instant durer, encore un peu, dans le silence d'une joie infinie.

[Fade To Black - Metallica ]

Je savais que Shina n'était pas habituée aux contacts physiques mais à vrai, moins non plus. Mais la rupture à laquelle nous avons été confronté avait été si terrible et tellement longue, que je n'aurai pas pu m'empêcher de l'étreindre. Franchement, la revoir, j'avais fini d'espérer. Et voilà qu'elle se pointait l'air de rien, devant moi. Enfin un bon hasard. Ce n'était même pas que j'étais découragé de ne pas savoir où la chercher, de savoir que j'avais très peu de chance de la retrouver. C'était juste que j'étais persuadé que jamais plus je la reverrai, qu'elle ne faisait plus partie de ce monde. Alors encore penser la revoir, c'était à oublier. Mais non... Elle était là devant moi. Fantastique non? C'était presque incroyable tellement c'était beau. Or, je savais qu'il restait une multitude de choses sombres - tel le fait que si James me retrouvait que ce soit n'importe où, il me tuait à présent - derrière cette joie. Mais au diable toutes ces pensées lugubres, à l'instant j'étais entrain de la retrouver, cette personne à laquelle je tenais tellement.

Shina n'avait pas changée, non, toujours le même caractère. On ne ser refait pas c'est connu, et puis tant mieux je l'aimais comme elle était. Oui, peut-être serait il mieux pour elle qu'elle change un peu mais... moi je ne trouvais pas. Enfin, je pouvais la comprendre d'une certaine manière. Son côté agressif, cette manie de toujours attaquer les gens, c'était une sorte de défense. "La meilleur défense, c'est l'attaque". Alors, si elle trouvait cela bon comme tactique, tant mieux pour elle, après tout.
Elle se dégagea doucement de mes bras en prononçant une phrase qui me fit sourire. "Normalement il va s'arrêter de pleuvoir pour un temps". D'un côté c'était positif mais pour le "un temps", je pensais savoir ce qu'il traduisait. On est jamais tranquilles.
Elle reprit la parole, après m'avoir observer un petit instant. Chaque matin je faisais de même dans la glace de ma salle de bain. "Mais putain John, qu'est-ce que tu deviens?" me disait une petit voix et tout ce que je lui répondais était "Ce que je dois devenir, un vieux loup solitaire et meurtri, rien de plus, rien de moins." Bref, vous l'auriez compris seul, j'étais tout simplement déprimé.
Je partais tout doucement dans mes pensées quand la vampire reprit la parole, comme si elle reprenait une simple conversation, ce qui me fit légèrement sursauté. Si ça allait? Bah...

- Ca dépend de quel point de vue. Et toi?

Je n'allais pas lui mentir, j'étais mal, c'était vrai. Ca se voyait mais même si ça faisait à peine quelques minutes qu'elle se trouvait devant moi, j'allais déjà un peu mieux. "Depuis le temps"... C'était vrai que ça faisait un bail qu'on s'était plus vus, et ça avait été dur, c'était vrai. J'aurais voulu lui poser une multitude de questions, mais je pense que la première qu'elle avait posé était la plus importante, au bout du compte, surtout quand on ne savait pas par laquelle commencer.