• La vie. Cette chose si compliquée que l'on nous donne sans qu'on la demande. Est-ce vraiment une bonne chose en fin de compte? Souvent, elle n'est pas rose comme dans les contes pour enfants. Même dans ces derniers, il y a des moments noirs - revenons à l'histoire de la maman de Bambi qui s'est faite rôtie -. Mais si la vie était trop belle, il n'y aurait plus aucun petit plaisir dedans.
La mienne, de vie, commence le 3 août 1763. Mes parents, lycanthropes tout deux, m'ont abandonné à l'âge de cinq ans et demi. Je me souviens encore du regard froid de mon père et des pleurs de ma mère. Il la battait, et moi aussi. J'aurais tout fait pour ne pas la quitter, et pourtant... Il ne voulait pas de moi. Il n'avait jamais voulu de moi, contrairement à elle. Combien de fois avais-je souhaité pouvoir retrouver ses gestes infiniment doux et ses paroles si rassurantes? Assez de fois pour vouloir la retrouver par après... Je sais que vous allez vous dire qu'elle aurait pu se défendre ou partir, vu qu'elle était lycan. Cependant, elle avait peur de son mari dont elle n'avait jamais souhaité. Il l'avait enlevé et l'avait mordu, ne voulant pas mettre au monde un hybride - déjà qu'au début, il ne voulait pas de gosses. Alors pourquoi ne pas m'avoir tué ou abandonné plus tôt? Bah ça, c'est grâce à ma très chère mère. Je vous dis, sans elle, je serai déjà mort depuis belles lurettes. Bref, vous l'avez compris j'étais prit comme orphelin alors que mes parents étaient encore en vie et que je savais qui c'était. De ce fait, la plus part des autres pensionnaires de l'orphelinat me détestaient. C'est ptête pour ça que souvent je jette des regards meurtriers aux gens que je ne connais que très peu ou pas du tout - faute à l'habitude.
Les 15 années suivantes, rien ne se passât d'extraordinaire. Personne ne m'adoptât et à 18 ans je dus quitter l'établissement sans beaucoup de chose - rien, quand on y pensait.
La plus part des jeunes gens de mon âge partaient vers l'armée, laissant leur famille et pour quelques uns, leur fiancée, seule. Pour ma part, je ne connaissais que deux membres de ma famille, dont l'un ne serait en aucun cas heureux de me voir et l'autre rentrerait dans une euphorie sans égal. Mais le problème ne s'arrêtait pas là ; je n'avais aucune idée d'où l'un ou l'autre se trouvait. C'était génial de se sentir seul et détesté de tout le monde. A chaque fois que je me baladais tranquillement dans une rue, tout les mauvais regards se retournaient sur moi. Bah, et pourquoi? Je ne pouvais pas savoir, je n'avais jamais compris ce que j'étais. Oui, je sais, vous le savez également ; je suis un loup-garou. Mais vous croyez qu'on le devine du jour au lendemain? "Oh tiens, je suis un lycanthrope! Quelle bonne surprise!"... Rhum, pas vraiment. En tout cas pour moi, sans personne pour me guider un tant soit peu, je n'étais qu'un humain comme les autres. Cependant, il était vrai que j'étais plus agile que la moyenne et que mes sens étaient surdéveloppés face à certains. D'autres, me dérangeaient fortement, juste à sentir leur odeur. J'avais toujours vécu comme ça, je pensais que tout le monde ressentait cela, sans jamais me poser la question d'être un véritable humain rentrant dans les normes habituelles ou non.
Comme je vous l'ai dit, vers mes vingt/vingt-et-un ans - si vous saviez et aviez calculé - quelque chose me délivrât toute la vérité ; non, je n'étais pas un humain "entrant dans les normes habituelles", pour me citer. Il était tard, environ 23 heures, ou encore minuit. Des voleurs s'attaquèrent à moi, contre tout attente - avais-je vraiment la tête d'un fortuné? . Je savais me débrouiller en combat mais pas contre 8 hommes armés jusqu'aux dents, une nuit noire et froide où j'étais sans doute un des plus fatigués par le travail de la journée - j'aidais le plus souvent les marchands à entreposer ou charger leur marchandise. Ce fut à partir de cet instant que je fis la connaissance avec "mon deuxième moi", le plus... sauvage, dirons nous. Par la force des choses, je m'étais transformé en un loup aux poils noirs de jais mélangés à d'autres gris clairs ou foncés sur tout mon corps. Mes yeux infiniment bleus gardaient leur intensité. Je peux vous dire que mes assaillants ne réfléchirent pas longtemps à déguerpir sous un ou deux de mes grognements plus que significatifs sur mes intentions.
Deux jours plus tard, 3 policiers allèrent me voir chez un marchand qui avait gentiment accepté de m'héberger pendant "le temps qu'il faudrait" (le temps que je voudrais bien travailler pour lui en fait). Ils m'embarquèrent sans explication et me mirent dans une petite cellule avec un colocataire à moitié fou. Ah ouais, je me fais agresser, je me défends par le seul moyen qui me reste et me voilà en taule? Youpie, je vous jure parfois les gens. Non mais je me suis pas laissé faire! En plus ; j'avais faim. Oui, ils donnaient peut-être un peu de pain mais j'avais beau vouloir le manger, ça ne remédiait pas beaucoup à mon problème.
Encore deux jours plus tard, au soir, j'avais décidé de sortir. Un peu de concentration, car je vous rappelle que ce n'était seulement que ma deuxième transformation et je me retrouvais une nouvelle fois en loup, identique à celui du premier soir. Le deuxième homme se trouvant dans la cellule ne pipât mot en m'observant, les yeux ébahis et la bouche bée. Ce fut comme cela que James Littleton fut parler de lui dans les journées à venir : "Une gigantesque bête noir s'échappe de la prison" "Lycanthrope en vue!" "Nous ne sommes plus en sécurité ; les loups-garons sont là!" Et pleins de gros titres qui signaient mon arrêt de mort, car les articles qui suivaient, d'une façon ou d'une autre comportaient les phrases "Une gigantesque bête noir et grise s'est sauvagement attaquée à la cellule la retenant prisonnière." "Deux gardes y ont laissé la vie." "James Littleton, la bête en question, est recherché mort ou vif." C'est ce que je lus, le lendemain dans un journal que j'avais trouvé par terre. En me retournant, une nouvelle vague de regards noirs tombât sur moi, mais pas dans le même genre que d'habitude. Non c'était plus tôt "Si j'étais toi, je compterais les derniers instants qui me restent à vivre. Tu vas crever James!" Quels mots rassurants, souvent prononcés par biens des assaillants... Je vais tout vendre et partir poète moi! Bon, j'arrête mes délires. Revenons en à ces doux mots ("Tu vas crever James"), compris dans un simple regard. Ne voulant pas tous les tuer, bien qu'aucun d'eux ne m'ait déjà apprécié et vice-versa, je partis en courant à toutes jambes. Cependant, sur deux pattes, c'était beaucoup moins rapide que sur quatre. J'étais bon coureur, mais eux étaient bien plus nombreux. Mon endurance fut mise à rude épreuve et bientôt je commençai à perdre du terrain. Je n'avais plus le choix, question de vie ou de mort : alors que je sautai une fourrée, je me transformai en la gigantesque bête recherchée. Beaucoup s'arrêtèrent, prit de stupeur ou de frayeur pendant que d'autres, plus braves, continuèrent à courir et s'époumoner contre moi. Néanmoins, contre la vitesse et l'endurance d'un lycanthrope, ils ne firent pas long feu.
Les jours qui suivirent, je me prêtai plusieurs fois à la chasse. Mes premières initiatives étaient pittoresques mais peu à peu, je devenais un chasseur aguerrit.
Je vivais donc seul, dans les bois, rencontrant parfois quelques voyageurs, marchands ou promeneurs s'en allant presque en courant en m'apercevant. Tout le monde était au courant. Je compris pourquoi : mon avis de recherche restait dans le journal et plusieurs affiches pour ma capture avaient été clouées aux multiples murs des cités alentours. Pendant les prochains mois à venir, voir ans, je devais rester seul et méfiant...

Deux mois plus tard, pendant lesquels je n'avais cessé de m'entraîner et le froid s'installer, je ne fis pas la rencontre de quelqu'un par hasard ; ce fut lui qui venu à la mienne. Il sentait comme moi, comme un lycanthrope, donc. Parce que je n'avais pas envie de casser ma solitude à cet instant, je me transformai et le grognai directement genre "T'es pas le bienvenu, casse toi". Mais il se contentât de m'observer avant de dire joyeusement, avec un sourire, me tendant la main "Lars Littleton, enchanté." Il se foutait de ma gueule? Soit, il voulait ma peau, bien que ce soit un lycan - totalement stupide, mais je suis têtu et méfiant - soit... est-ce que je pouvais imaginer avoir un frère? Un cousin alors? Un oncle... non, trop jeune. Je repris forme humaine et lui dit de mon ton le plus froid "Et je suis censé te croire?" Il me répondit, sans quitter sa bonne humeur de ces mots "Eh bien oui. Je suis ton frère, d'où le même nom de famille, on doit se faire confiance non?" Il était marrant! Pendant quelques minutes nous débattions avant que qu'il me dise "Notre père s'appelle Harry Littleton, notre mère se nommait Julie Stewart et m'a fait promettre de te retrouver et de bien m'entendre avec toi, juste avant de rendre son dernier soupire." Je fronçai les sourcils. Qu'est-ce qu'il racontait? Il avait vrai, sur toute la ligne. Mais... notre mère, ma mère, morte? Voyant mon visage se décomposer, il jugeât utile de m'en dire plus. "Notre père l'a livré aux vampires. Je ne sais pas si tu sais, mais les vampires nous haïssent pour une vieille histoire de guerre qui dure depuis déjà super longtemps!" Bon... Je devais me résoudre à l'écouter. Mais quelque chose me trottait dans la tête : pourquoi l'avait-il gardé, lui? Après un bref moment de réflexion sur la nouvelle que je venais d'apprendre, je le dévisageai avant de lui poser la question "Et pourquoi, toi, ils t'auriaent gardé?" Pourquoi? Alors que j'avais vu jusqu'ici le visage de cet homme si rayonnant, le voilà qu'il perdait tout éclat. "Maman m'a caché. Elle m'a donné à une nourrice et venait me voir toutes les semaines. Notre père l'a découvert il y a trois jours et c'est pour ça qu'il l'a livré à ces saletés de buveurs de sang." Ah... Il culpabilisait. Il pensait que c'était de sa faute qu'elle était morte. D'un côté, on ne pouvait pas le cacher, ça l'était un peu. Mais pas assez pour qu'il porte tout sur son dos ; le coupable dans tout ça, c'était notre géniteur, qui depuis le début, n'avait fait que la tourmenter.
En quelques heures à peine, nous étions déjà devenus les meilleurs amis du monde. Ca vous semble peut-être beaucoup dire, mais jamais je ne m'étais senti aussi bien avec quelqu'un.
Lars, plus informé que moi sur les lycanthropes et les vampires, m'expliquât tout ce qu'il y avait à savoir quand on était loup-garou. Il me parlât également du clan qui réunissait tout les lycans de l'Angleterre. A notre arrivée, lui, il connaissait déjà tout le monde. Ceux-ci semblaient quasiment tous l'apprécier, à quelques exceptions, comme toujours. Il était si... charmant? Joyeux? Optimiste? Marrant? Déconneur? C'était quelqu'un de ... extraordinaire, simplement. Je crois que c'est de lui que vient ma joie de vivre actuelle. Avant de le connaître, j'étais juste froid mais surtout seul. Et puis, tout les gens pareils que moi avec qui je vivais, eux aussi, m'apportaient beaucoup. J'étais bien.

Quelques guerres, combats, missions, peines, joies, ..., rien d'extrêmement palpitant ne se passât pendant plus d'un siècle et demi. Pourtant, j'étais terriblement bien. Je partageais ma vie avec un être très très très cher et avec des gens que j'aimais et qui m'aimaient, rien de plus à souhaiter. Pourtant... Après toute cette quasi tranquillité, quelque chose arrivât, et c'était tout simplement... irréversible.

Il faisait froid, nous étions en hiver, un hiver blanc. Depuis plusieurs jours, les lycans surveillaient les vampires comme jamais qui eux faisaient de même. Lars et moi, étions bien sur de la mise. Devenus puissants, le chef nous appréciaient autant que par notre moral que par notre physique et notre expérience : en gros, nous étions des éléments forts.
Alors que nous étions une petite troupe à faire la ronde, plus loin, deux autres groupes se firent attaqué. Nous nous sommes séparés pour aller en renfort. Ceux étant partis avec moi, revenaient vers le camp vainqueurs. J'étais autant fier d'eux que de moi, on avait éliminé quelques vampires. Or, je me rendis compte en un instant que mon frère n'était pas là, et toujours pas revenu. J'avais un mauvais pressentiment et partis tout de suite vers les bois sous les cris contradictoires des mes précédents équipiers, le chef ayant ordonné de rester au camp pour l'instant. Mais je ne pouvais pas! Non! Je n'aurais su me résoudre à les abandonner, à abandonner Lars. C'était trop long pour que la bataille leur soit favorable, c'était trop atroce que pour je le croie vraiment. Pourtant...
Affolé, courant partout, reniflant l'air sans cesse, je retrouvai la trace des lycans. Plusieurs corps de loups gisaient sur le sol. Cette vue me tordit l'estomac. Un bref coup d'oeil m'informait que mon frère ne faisait pas partie de ce massacre là. Je repris ma course de plus belle, le plus vite possible. Je sentais de plus en plus l'odeur de plusieurs vampires et parmi elle se trouvait... celle d'un lycan que je connaissais trop bien. J'accélérai une nouvelle fois l'allure , si c'était encore possible.
Je les aperçus, ces buveurs de sang, affairés sur quelque chose. La seule idée qui m'en vint me courbait encore plus le ventre.
D'une fois, tout les vampires se retirèrent et je vus sur quoi il s'acharnait. Je ne pus résorber un cris autant de rage que de tristesse ; c'était ce à quoi je pensais...
Mon frère gisait sur le sol, couvert de sang mais surtout de coups. Tout en cavalant, je ne cessais de répéter son nom. Il ne pouvait pas mourir! Quand je fus à une dizaine de mètres de lui, je bondis et me transformai en humain, forme dans laquelle il avait décidé de finir, trop faible pour continuer à faire quoique ce soit.
Je le suppliai de ne pas me laisser, le prenant dans les bras pour le tirer de la froideur de la neige. J'espérai tellement... Pourtant c'était clair autant pour lui que pour moi : il allait mourir à cet instant. Haletant, il me dit, comme dernière phrase "Au moins, on a tenu la promesse de maman. Oublie pas frangin, on s'entendra toujours bien et je t'aimerai toujours, James... Litlleton... Enchanté. "Je fondis en larmes. Il venait de rendre son dernier souffle.
Longtemps, je restai sur son corps inerte, mes larmes continuant de couler. Après un temps indéfinissable, je me levai et pris son corps. Je le rapportai au camp, le regard loin devant, mêlant haine profonde et tristesse. Plus que jamais, je les haïssais. Deux fois j'avais aimé quelqu'un, deux fois je l'avait perdu de leur faute.
Toutes les personnes du clan m'observèrent déposer le corps de mon frère défunt sur une couverture. Je leur jetai un regard sombre avant de partir. Je ne savais pas où j'allais, je voulais juste m'éloigner d'eux. Apparemment, ils me comprenaient, ne me dérangeant pas, bien qu'au loin je sentais plusieurs paires d'yeux m'observant et des bouches chuchotant.
Quelques années passèrent. J'étais beaucoup moins joyeux qu'auparavant. J'étais... de nouveau seul.
Un peu plus tard, le chef du clan allait lui aussi terminer ses jours. Il s'était prit plusieurs balles d'argent et les hommes étant avec lui à cet instant rentrèrent avec son corps et citèrent ses dernières paroles "Je veux que ce soit James qui reprenne le flambeau. C'est un type bien, vraiment, dîtes lui bonne chance de ma part." Je fus secoué par cette nouvelle. Mais, si il le voulait, je le ferai. C'est ainsi qu'à 193 ans, je devenus chef du clan des lycanthropes de Londres.
A présent, j'ai 252 ans. 53 ans que mon frère est morte, 59 ans que je suis alpha.

Voilà, toute ma vie. Je suis tout de même un homme heureux mais triste à la fois. C'est peut-être compliqué, mais je me comprends, moi James Littleton... "Enchanté".